La culture du bonsai est une histoire d’équilibre subtil entre les proportions d’air et d’eau disponibles pour les racines. Nos potiers français l’ont bien compris, pour bien cultiver nos bonsai, un fond de pot régulier avec un bon drainage et une bonne aération sont primordiaux pour la santé des racines, et donc de l’arbre.
Vous pouvez penser à tout, régler le substrat et sa granulométrie en fonction de chaque espèce, de votre climat et de vos capacités d’arrosage puis faire un rempotage techniquement parfait, si derrière vous implantez tout ça dans un pot qui retient l’eau, vous vous tirez littéralement une balle dans le pied.
Lors de l’achat d’un pot pour votre bonsai, l’important est donc de bien vérifier qu’il ne présente pas de pièges : fond avec des creux qui retiennent l’eau, trous pas assez nombreux ou trop petits, etc. Sur les pots neufs ou récents, normalement il n’y a pas de problème. Oui mais voilà, nous n’avons pas tous des arbres qui méritent un pot neuf ou de grande qualité et nous n’en avons d’ailleurs pas tous le budget!
De très nombreuses pépites se cachent dans nos garages ou au fond de nos jardins! Bien des pots d’occasion importés en masse dans les années 90/2000 ont en effet pris une patine très intéressante et on peut facilement en trouver à petits prix. Seulement beaucoup d’entre eux présentent un problème de drainage, avec bien souvent un seul trou central, et sont donc délaissés, voire jetés!
Nous allons voir ici qu’il est pourtant possible de récupérer ces pots sans avoir besoin d’être un(e) surdoué(e) du bricolage.
Photos 1 et 2 : Ce pot de 26cm présente une forme et un émail intéressants mais avec un seul trou de 15mm, il serait dangereux de l’utiliser
Photo 3 : Après évacuation de l’eau d’arrosage, on constate que près de 5mm d’eau stagne au fond du pot! Des trous de drainage doivent être rajoutés avant de pouvoir l’utiliser
De l’importance d’un pot adapté
Un pot avec un seul trou pose la question du manque de drainage et d’aération pour les racines évidemment mais aussi de l’attache de l’arbre qui ne sera jamais aussi solide et efficace qu’avec plusieurs trous. D’ailleurs les soucis pour attacher les arbres peuvent également se présenter avec des pots modernes, simplement parce que parfois le pot est parfait pour l’arbre mais la position des trous ne permet pas de l’attacher correctement et nous oblige à « bricoler », là où un simple rajout de trous suffirait.
Vous être sûrement en train de vous dire que c’est trop risqué ou trop compliqué. L’équipement nécessaire et pourtant minime et cela ne prend que quelques minutes, pour un résultat qui vaut vraiment la peine de se donner un peu de mal.
Percer un pot en pratique
Vous pouvez travailler sur pot sec, en mouillant régulièrement la zone à percer pendant tout le travail mais l’idéal reste de le faire tremper plusieurs heures, tout une nuit par exemple, afin de saturer la terre en eau et ainsi de la rendre plus tendre. Le perçage en sera très grandement facilité.
Sur pot toujours mouillé, et après avoir pris soin d’ôter le mode percussion de la perceuse, démarrez à vitesse faible et présentez le forêt à l’endroit que vous souhaitez percer avec un angle d’environ 45 degrés. Cet angle permettra d’entamer la terre et de fixer la position du trou. Une fois la position engagée, accélérez doucement et régulièrement en même temps que vous redressez l’angle de perçage jusqu’à une position verticale. Toujours sans forcer mais en maintenant la perceuse fermement, accélérez jusqu’à ce que le forêt traverse le pot.
Photos 4 et 5 : Avec un forêt diamant de 18mm, plusieurs trous de drainage sont réalisés et le trou central est agrandi. Malgré quelques fêlures anciennes sur le pot, il ne se casse pas
Si la terre chauffe durant le perçage, n’hésitez pas à mouiller la zone régulièrement pour éviter toute casse et économiser le forêt.
Quant au nombre et à la position des trous, les cas de figure sont multiples. Avant toute chose, il est intéressant de mettre de l’eau dans le pot et de vérifier la vitesse d’évacuation et les éventuelles zones de stagnation. Si vous connaissez bien le racinaire du bonsaï destiné au pot, l’idéal est de positionner des trous en fonction de l’arbre, voire même de prévoir ceux pour les attaches en fonction du racinaire. Pour un pot avec un fond bombé ou des creux dans lesquels l’eau stagne, pensez les trous pour drainer à l’endroit où les risques existent, plus qu’en pensant esthétique. Si vous avez des doutes, n’hésitez pas à vous inspirer de ce que font les potiers…
Photos 6 et 7 : Après vérification, des trous sont rajoutés aux endroits où l’eau a encore du mal à s’évacuer ainsi que ceux pour les attaches avec des forêts de 5 et 8mm
Ne jetez plus les vieux pots avec leur belle patine et tentez l’expérience du recyclage !
Le matériel pour percer
Vous aurez besoin d’une perceuse et de forêts diamant. Dans l’idéal de plusieurs diamètres si vous voulez percer plusieurs pots de tailles différentes ou des types de trous différents (drainage, attache). Pour un diamètre relativement standard, le 18mm correspond assez bien à la plupart des pots. Le diamant fonctionnera pour le grès, la terre cuite mais aussi la porcelaine.
Article paru dans la revue Esprit Bonsaï n°117 de 2022
Photos : Francis Arotçaréna – Tous droits réservés
